Aveuglante

Alfredo Jaar


Alfredo Jaar, Laments of the images, Documenta 11, installation, 2002. © transports-design

L’essentiel du travail d’Alfredo Jaar réside dans son objectif «de faire de l’art à partir de l’information que la plupart d’entre nous préféreraient ignorer». La conviction de Jaar que l’imagerie photographique prive l’imagination de la transformation esthétique et de l’engagement affectif est constante dans son engagement permanent à représenter les problèmes sociaux, politiques et humains. Dans ses photos, ses textes et ses installations lumineuses, Jaar traduit la puissance des médias et la violence mondiale par le médium de la photographie et la question emblématique de la représentation que celui-ci pose. Depuis le début des années 1980, Jaar a déployé de nouvelles stratégies de présentation qui, plutôt que de rivaliser avec la vitesse des images des autoroutes de l’information et du consumérisme, tentent de contextualiser et de ralentir le processus de réception et de compréhension du spectateur. Sondant les limites des possibilités de représentation de la photographie, Jaar cible l’indice singulier d’une phrase écrite, le gros plan d’une scène personnelle, ou l’image recadrée d’une expression humaine pour nous confronter à nous-même sur le mode du face à face. Avec Lament of the images, Jaar crée une installation qui se compose d’un espace sombre, avec trois textes lumineux insérés dans un mur, deux couloirs, et un deuxième espace de lumière blanche aveuglante. Contrairement aux trois phrases brillant dans l’obscurité, le mur de la lumière aveugle momentanément la vision, métaphore de notre conscience enfouie, obscurcie par le flux quotidien des images médiatiques. Faisant l’expérience de l’espace, nous tentons physiquement et mentalement de renouveler notre façon de lire les informations et d’accéder à la compréhension des images. B.C [traduit de l’anglais, Documenta 11, Short Guide, p. 122]